Allonger la durée de cotisation pour rétablir l’équilibre des caisses de retraites sans avoir à toucher au montant des allocations, c’est à première vue une idée saine d’esprit. Elle avait été retenue par Sarkozy et Hollande s’apprête à poursuivre dans la lignée. Sauf qu’en période de crise, et donc de destruction nette d’emploi, allonger la durée du travail, c’est envoyer des gens au chômage ! C’est ce qu’explique Luc Legoux, démographe, maître de conférence à l’Institut de Démographie de l’Université Paris 1, dans un courriel aux adhérents d’ATTAC que nous reproduisons ici.
« Démographe à l’Université Paris1 je vous envoie un graphique réalisé à partir des données de l’Insee qui explique à lui seul une grande partie de la croissance du chômage, et surtout pourquoi le nombre de chômeurs devrait croître d’environ un million durant le quinquennat de François Hollande suite à une décision de Nicolas Sarkozy en 2010.
Les nombreux commentaires sur la réforme des retraites n’analysent jamais ou presque son impact sur la population d’âge actif. Or cette réforme accroît à terme en 2018 la population d’âge actif de plus de 1,6 million de personnes sans créer le moindre emploi. Une croissance du nombre d’actifs sans croissance équivalente du nombre d’emplois implique mécaniquement une croissance du nombre des chômeurs ; la croissance du taux d’activité des séniors ainsi obtenue impose une croissance du taux de chômage des jeunes.
Le nombre de chômeurs devrait croître d’environ un million durant le quinquennat de François Hollande suite à une décision de Nicolas Sarkozy en 2010.
La réforme des retraites de 2010 s’applique aux personnes nées après le 1er juillet 1951 (60 ans après le 1er juillet 2011). Elle n’a donc commencé à faire augmenter la population active qu’à partir du deuxième semestre 2011, et d’une manière très progressive, l’âge d’ouverture des droits étant relevé de 4 mois tous les ans pour les générations suivantes, jusqu’à 62 ans pour la génération 1956 (ouverture des droits en 2018). L’effet sur la croissance du chômage s’étale donc sur tout le quinquennat de François Hollande.
Si la politique de redressement productif réussissait à éviter les destructions nettes d’emplois, ce qui serait une prouesse en période de crise, il y aurait tout de même un million de chômeurs en plus en 2017. Avec un retour à la retraite à 60 ans le nombre de chômeurs aurait pu diminuer puisque la population entre 20 et 60 ans exacts diminue légèrement dans les projections de l’Insee.
Le refus de François Hollande d’abroger la réforme de Nicolas Sarkozy et de financer les retraites par une hausse des cotisations le condamne à l’échec dans la lutte contre le chômage. »